Echos de la Retraite Montagne
Cette retraite accompagnée, de 5 jours, associait prières et marches en montagne.
Elle a eu lieu au Sanctuaire Notre Dame de Fenestre du Dimanche 20 au Vendredi 25 août 2017.
2 participants vous partagent leurs expériences vécues.
1er témoignage
J’ai toujours été animée d’une profonde quête spirituelle. Je sentais que les paroles du Christ recelaient une grande sagesse ; certaines me touchaient, me parlaient mais, la plupart du temps, faute de clés suffisantes, je les trouvais mystérieuses, voire confuses. Elles me résistaient, ne résonnaient pas en moi et je restais ainsi à la surface.
Alors, je me suis tournée vers d’autres voix, en particulier les sages indiens que le yoga m’a fait découvrir. Elles avaient le mérite d’être plus claires et surtout reliées à une pratique, une méthode adaptée à ma vie de tous les jours. Car il s’agissait de s’observer, voir comment le mental et toutes les différentes émotions, comme les peurs, les inquiétudes, pouvaient vite prendre le dessous. Et surtout comment dépasser son égo et travailler le lâcher prise.
Et puis, depuis quelques temps, après quelques retraites non accompagnées et des lectures sur les évangiles, j’ai repris la Bible et les paroles du Christ me devenaient éclairantes.
Cette retraite a confirmé et consolidé ma nouvelle approche et j’ai découvert ces 3 choses très importantes :
Merci Seigneur de m’avoir permis de te rencontrer.
Joëlle
Vous avez dit retraite ?
Quand la personne avec laquelle je vis depuis près d'un an me dit "tiens, Geneviève organise une retraite dans la montagne fin août, ça te dirait qu'on y aille ensemble ?", je ne pense sûrement pas à lui dire non. Bien sûr qu'on va s'inscrire .... c'est à La Madone de Fenestre, coin plutôt sympa, je me rappelle avec plaisir les quelques retraites que j'ai effectuées en région parisienne quand j'étais gamin.... en plus je goûte depuis quelques mois à la randonnée et ça me plaît.
Avec le bulletin d'inscription il y a une notice, bien sûr elle subira le même sort que celle de l'appareil ménager que j'ai acheté dernièrement... il y a aussi un petit questionnaire sur ce que j'attends de cette retraite... là, pas question d'y échapper... je commence une nouvelle vie, ... mais l'ancienne a laissé des traces, je ne sais plus très bien où j'en suis, bref ça me fera du bien de me retrouver seul avec moi-même... quelques semaines avant le départ, j'en parle autour de moi et cette retraite silencieuse de cinq jours en fait rire quelques-uns qui me connaissent bavard comme un camelot et qui, quand il ne parle pas, chantonne...
Dimanche soir.
Ça y est, nous y sommes, et à l'accueil qui se fait à l'heure du dîner, l'ambiance est sérieuse et "le tour de table" qui est en cours m'enseigne que parmi la douzaine de retraitants présents, je ne suis pas seul à vivre cette expérience pour la première fois.
Après le dîner, l'organisation de la retraite et le programme du lendemain sont développés et là je commence à entrevoir ce que vont être les cinq prochains jours ; prendre du temps pour écouter la parole de Dieu, désencombrer notre vie et y mettre de l'ordre.... Au cours des journées en nous baladant dans la montagne, nous allons faire des exercices qui vont, tout en étant séparés de notre environnement habituel, nous aider à entrer dans le silence intérieur de notre tête. Ces exercices sont basés sur la méthode développée par Saint Ignace... j'ai vaguement entendu parler de lui, mais sans plus. Nous aurons chaque fin d'après-midi un bref entretien avec notre accompagnateur spirituel...
Entrer dans le silence intérieur, ça me tente, mais écouter la parole de Dieu... je ne sais pas où j'en suis avec lui... La Bible, je ne connais pas bien, Jésus, oui bien sûr j'y pense beaucoup et je sais ce qu'il a fait, mais Dieu ?... Dans l'exercice du lendemain nous devrions aller à sa rencontre.
Lundi.
Tôt le matin, je suis oppressé... je n'ai pas bien dormi... dans ma vie je n'ai jamais rencontré Dieu, j'ai peur de le rencontrer... et j'ai peur de ne pas réussir à le rencontrer... Après une heure de marche, premier exercice "La Genèse 1, 1-31", je connais, je l'ai lue plusieurs fois, mais là c'est différent, je suis en montagne, l'air est doux, pas loin de moi il y a un troupeau de moutons.... je dois ressentir ce texte ancien, très ancien.... justement, n'y a t'il pas contradiction entre ce que nous apprend la science et ce qui est dit dans ce texte ? L'homme n'est-il pas "arrivé" après une longue évolution de cellules à l'origine simples ?.... Faudrait-il négliger ces connaissances et dire "je crois en Dieu et à ce qu'il a fait en quelques jours ?", "remplissez la terre et soumettez-La", n'est-ce pas choquant ?... je suis de nouveau oppressé...
Après la prise du pique-nique, premier exercice corporel quotidien, le thème : "le regard". Le paysage est grandiose, je me sens voûté, l'air est pur mais je ne respire pas à fond, je me sens quand-même bien, je profite du calme... mais devant cette nature immense je me sens inutile, alors je prends cette nature environnante comme un cadeau...
En milieu d'après-midi, deuxième texte quotidien : Jean 8, 12. Jésus, la lumière du monde... En fin d'après-midi, premier entretien avec mon accompagnateur spirituel... on ne se connaît pas... le contact est "évident"... simple... je parle de ma journée et de suite j'aborde ce que je pense de "La Genèse" et là, j'entends comme une autre évidence ; pourquoi y aurait-il incompatibilité entre ce que l'on sait aujourd'hui de la création du monde et ce texte ancien ? Les mots sont simples, l'écoute attentive et respectueuse... bref, il a bien fallu écrire ce texte ancien de la Bible avec des mots, des idées et des images simples pour toucher le cœur et l'esprit des gens de l'époque. Et puis, me dit mon accompagnateur, il est moins important de savoir comment que de savoir pourquoi... c'était sa conclusion de notre premier entretien.... Ce qu'il vient de me dire, ça me plaît... je retourne au chalet et je repense à cette question qui me trotte dans la tête depuis plus de quarante ans : l'univers sert à quoi ? Admettons que Dieu ait créé tout ça parce qu'il nous aime... ça lui sert à quoi d'être gentil ?
Le soir après l'Eucharistie, l'ambiance du dîner me paraît pesante, trop silencieuse, tendue, j'ai l'impression que les retraitants "font la gueule"... comme si à un dîner de famille auquel j'arrive en retard, visiblement tout le monde vient de se disputer. Ça m'amuse plutôt, après tout, le repas est très bon, je suis fatigué de ma journée et je n'ai pas envie de parler...
Avant d'aller se coucher, le programme en trois temps de la journée du lendemain nous est proposé. Je m'endors soulagé, heureux de pouvoir oublier cette soi-disant contradiction et satisfait de cette première journée qui est passée plus que rapidement...
Mardi.
08h30, départ pour notre deuxième journée. Une heure plus tard, arrêt et exercice sur le texte de "L'Exode" 3, 1-8a. J'ai déjà lu ce texte mais là, je me concentre assis confortablement sur un rocher accueillant et lis lentement, j'essaie de m'imaginer présent au côté de Moïse... Quelque chose me chagrine dans ce texte : Dieu parle de "son peuple", le peuple hébreu esclave des Égyptiens... Je ne comprends pas bien cette restriction, le peuple de Dieu n'est-il uniquement que le peuple hébreu ? Le Seigneur n'est-il "descendu" que pour délivrer le peuple hébreu des Égyptiens ? À cette époque, il y a très vraisemblablement et malheureusement bien d'autres peuples en esclavage,... pourquoi ne sauver que le peuple hébreu ? Et là, je me rends compte que j'ai validé en moi "l'existence" de Dieu... mais Dieu "universel" qui aime tous les hommes où qu'ils soient, ...peut-être a-t-il même envoyé son fils dans d'autres régions du monde, ... il me semble que je vais trop loin dans ma réflexion,.... je continue,.... peut-être que d'autres textes écrits, qui n'ont pas survécus comme la Bible, ont relaté les actions de Dieu dans d'autres lieux ? ...
Et tout naturellement, je parle au Seigneur, je crois même que je lui parle à voix haute, sans crainte ni peur, sans être trop sûr de moi non plus ..."Sans doute as-Tu agi dans d'autres lieux, sans doute Tes actions ont-elles été transmises oralement puis par écrit, sans doute, même, ne portes-Tu pas le même nom que Dieu, Seigneur ou Yahvé..." Sans doute aussi, et j'en suis convaincu, suivant les diverses régions du monde, les différences de transcription de Tes actes, les approximations, les différences de compréhension ont-elles forgé des religions différentes.... Pourquoi si tel est le cas, ne pas admettre ces différences venues des origines et essayer de réconcilier les croyances "sœurs" ? ...
Après cette "conversation", je me sens calme, apaisé... j'ai repris la marche et me mets en condition pour l'exercice corporel du jour : Le toucher.
Je suis assis sur un rocher rugueux, trop solide, ... je sens que cette pierre dure et froide peut être dangereuse dans cette montagne... il me vient des images de chutes... des blessures, ... je me lève pour prendre contact avec les végétaux qui m'entourent, ... je caresse les branches d'un tout petit mélèze qui semble fragile, elles sont froides mais très douces, ... et je crois entendre le petit arbre me dire ; "ne me fais pas de mal, .... laisse-moi une chance de grandir...". Les feuilles du millepertuis qui est à côté sont tout aussi froides mais ne sont pas agréables au toucher, et l'arbuste semble me dire ; "laisse-moi tranquille...". Plus loin, l'écorce de l'énorme pin que j'entoure de mes bras est tiède, tourmentée, ... elle semble devoir souffrir pour que le pin puisse pousser... Et là, dans ce grand silence, faisant un câlin à cet arbre immense,... je repense à ma toute petite enfance, aux câlins que je n'ai pas eus de ma mère, à ceux que je recherchais en caressant les bras de ma maîtresse d'école..., à ceux, soixante ans après, que j'ose faire à ma mère qui est maintenant âgée... Je pense aussi aux contacts que j'aime avoir avec les vieux outils... ceux qui ont travaillé le bois... il me semble à chaque fois qu'ils me racontent comment ils ont été utilisés, comment ils ont rendu service... Mon Grand-père était charpentier, dans notre maison il passait tous les soirs, dire trois mots, boire son verre de vin et, avant de partir, il nous faisait, à mes parents et aux trois enfants que nous étions, le signe de croix sur notre front en nous disant "bénisse", .... ce sont les seuls contacts que je me souviens d'avoir eu avec mon Grand-père.... Mon père aussi me faisait ce signe,... par lui non plus je n'ai jamais eu de câlins... Ce signe, je le fais encore, quand je peux, à ma mère, à mes enfants qui me manquent beaucoup et, depuis peu à ma compagne... Je desserre cette étreinte pouvant sembler ridicule à un observateur non avisé et me remets en route pour tester le toucher de mes pieds avec le sol. Outres les réflexions logiques et banales sur les différentes configurations du terrain, je m'attarde sur ces petites zones où les pierres sont petites et sur lesquelles, malgré mes bonnes chaussures de marche, je dérape... Ces zones ne sont pas fiables, les pierres n'y sont pas liées entres elles, elles sont trop petites pour former un appui solide... Ne suis-je pas comme ces minis pierriers... Mes convictions ne sont-elles pas comme ces pierres, trop petites et surtout trop nombreuses, ...bref, suis-je solide ? Ce que j'aime, ce que je désire ne sont-ils pas trop flous, trop indécis ? ... J'ai souvent, pour ne pas dire toujours, agi par rapport à ce que pouvaient penser les autres, ...de moi, de mes actions, ...de mon comportement. En fait, ai-je été un jour moi-même et pour résumer, qui suis-je vraiment ? Tout en marchant je sens que je m'éloigne de l'exercice et que j'exagère,... en tout cas depuis ma "séparation" et ma nouvelle vie qui commence, mes choix sont beaucoup plus personnels,... sans pour cela tomber dans l'égoïsme, bref, tout va mieux...
Le dernier exercice de la journée à comme support le texte de Marc 1, 29-31. Je n'arrive pas, malgré les bonnes conditions dans lesquelles je me suis installé, à me concentrer sur le texte, ... je me sens las, j'ai ressenti trop de choses pendant cette magnifique journée... j'ai du mal à associer Dieu dans tout ce que je fais, ... je commence à l'associer dans tout ce qui a été créé...
L'entretien avec mon accompagnateur sera très fort, les échanges émouvants, ... les réflexions que j'ai eues pendant cette journée, tout ce que j'ai ressenti, tout ça me semble clair, je suis heureux, mais épuisé... la nuit arrive avec son silence.
Les jours suivants seront rythmés comme les autres, avec cette rigueur après tout très rassurante. Chaque jour deux textes de la Bible et les exercices corporels avec l’écoute, le souffle et le dernier jour le goût des fruits cueillis spirituellement.
…
Vendredi : Au dernier soir de cette retraite, je ne suis plus "le même", je n'ai plus peur de parler à Dieu, de parler de Dieu... Mon fruit préféré que j'ai cueilli durant ces jours ? J'en parlerai pendant l'Eucharistie, ... c'est celui de mardi, qui m'a fait prendre conscience de la Création par "un Dieu universel"...
Je ressens la violence de ces jours-ci... pas la brutalité, mais l'intensité des réflexions, des découvertes sur moi-même... comme me dit ma compagne, qui a cru que je ne la "voyais" plus pendant ces cinq jours : "tu n'es plus le même ", c'est vrai, et heureusement ! Je ne m'attendais pas à ce que j'ai ressenti... je crois que Dieu m'a donné rendez-vous à La Madone de Fenestre... et que nous avons parlé comme des amis, des amis qui ne s'étaient pas vus depuis longtemps ou des nouveaux amis... Il faut maintenant que je "digère" tout ce que j'ai vécu pendant cette merveilleuse retraite... sans pour autant trop "faire retomber la pression"... utiliser ce que j'ai découvert, ressenti, appris...
Extrait du bilan d’un retraitant
Alors, je me suis tournée vers d’autres voix, en particulier les sages indiens que le yoga m’a fait découvrir. Elles avaient le mérite d’être plus claires et surtout reliées à une pratique, une méthode adaptée à ma vie de tous les jours. Car il s’agissait de s’observer, voir comment le mental et toutes les différentes émotions, comme les peurs, les inquiétudes, pouvaient vite prendre le dessous. Et surtout comment dépasser son égo et travailler le lâcher prise.
Et puis, depuis quelques temps, après quelques retraites non accompagnées et des lectures sur les évangiles, j’ai repris la Bible et les paroles du Christ me devenaient éclairantes.
Cette retraite a confirmé et consolidé ma nouvelle approche et j’ai découvert ces 3 choses très importantes :
- Ce n’est pas la peine de chercher Dieu. Il est déjà là et nous appelle. Apprenons à être disponibles pour écouter son appel.
- Et, en plus, on peut lui parler comme un ami parle à un ami. Une découverte pour moi primordiale car je n’avais jamais noué de dialogue aussi proche, sauf de manière occasionnelle.
- Et enfin, j’ai acquis une vraie méthode pour méditer les paroles du Christ, à travers une série d’exercices spirituels quotidiens, à la manière d’Ignace de Loyola.
- Et cerise sur le gâteau, un accompagnement individuel, en fin de journée, qui m’a été très précieux. Je remercie vivement mon accompagnateur pour ses grandes qualités d’écoute et d’ouverture.
Merci Seigneur de m’avoir permis de te rencontrer.
Joëlle
2e témoignage
Vous avez dit retraite ?
Quand la personne avec laquelle je vis depuis près d'un an me dit "tiens, Geneviève organise une retraite dans la montagne fin août, ça te dirait qu'on y aille ensemble ?", je ne pense sûrement pas à lui dire non. Bien sûr qu'on va s'inscrire .... c'est à La Madone de Fenestre, coin plutôt sympa, je me rappelle avec plaisir les quelques retraites que j'ai effectuées en région parisienne quand j'étais gamin.... en plus je goûte depuis quelques mois à la randonnée et ça me plaît.
Avec le bulletin d'inscription il y a une notice, bien sûr elle subira le même sort que celle de l'appareil ménager que j'ai acheté dernièrement... il y a aussi un petit questionnaire sur ce que j'attends de cette retraite... là, pas question d'y échapper... je commence une nouvelle vie, ... mais l'ancienne a laissé des traces, je ne sais plus très bien où j'en suis, bref ça me fera du bien de me retrouver seul avec moi-même... quelques semaines avant le départ, j'en parle autour de moi et cette retraite silencieuse de cinq jours en fait rire quelques-uns qui me connaissent bavard comme un camelot et qui, quand il ne parle pas, chantonne...
Dimanche soir.
Ça y est, nous y sommes, et à l'accueil qui se fait à l'heure du dîner, l'ambiance est sérieuse et "le tour de table" qui est en cours m'enseigne que parmi la douzaine de retraitants présents, je ne suis pas seul à vivre cette expérience pour la première fois.
Après le dîner, l'organisation de la retraite et le programme du lendemain sont développés et là je commence à entrevoir ce que vont être les cinq prochains jours ; prendre du temps pour écouter la parole de Dieu, désencombrer notre vie et y mettre de l'ordre.... Au cours des journées en nous baladant dans la montagne, nous allons faire des exercices qui vont, tout en étant séparés de notre environnement habituel, nous aider à entrer dans le silence intérieur de notre tête. Ces exercices sont basés sur la méthode développée par Saint Ignace... j'ai vaguement entendu parler de lui, mais sans plus. Nous aurons chaque fin d'après-midi un bref entretien avec notre accompagnateur spirituel...
Entrer dans le silence intérieur, ça me tente, mais écouter la parole de Dieu... je ne sais pas où j'en suis avec lui... La Bible, je ne connais pas bien, Jésus, oui bien sûr j'y pense beaucoup et je sais ce qu'il a fait, mais Dieu ?... Dans l'exercice du lendemain nous devrions aller à sa rencontre.
Lundi.
Tôt le matin, je suis oppressé... je n'ai pas bien dormi... dans ma vie je n'ai jamais rencontré Dieu, j'ai peur de le rencontrer... et j'ai peur de ne pas réussir à le rencontrer... Après une heure de marche, premier exercice "La Genèse 1, 1-31", je connais, je l'ai lue plusieurs fois, mais là c'est différent, je suis en montagne, l'air est doux, pas loin de moi il y a un troupeau de moutons.... je dois ressentir ce texte ancien, très ancien.... justement, n'y a t'il pas contradiction entre ce que nous apprend la science et ce qui est dit dans ce texte ? L'homme n'est-il pas "arrivé" après une longue évolution de cellules à l'origine simples ?.... Faudrait-il négliger ces connaissances et dire "je crois en Dieu et à ce qu'il a fait en quelques jours ?", "remplissez la terre et soumettez-La", n'est-ce pas choquant ?... je suis de nouveau oppressé...
Après la prise du pique-nique, premier exercice corporel quotidien, le thème : "le regard". Le paysage est grandiose, je me sens voûté, l'air est pur mais je ne respire pas à fond, je me sens quand-même bien, je profite du calme... mais devant cette nature immense je me sens inutile, alors je prends cette nature environnante comme un cadeau...
En milieu d'après-midi, deuxième texte quotidien : Jean 8, 12. Jésus, la lumière du monde... En fin d'après-midi, premier entretien avec mon accompagnateur spirituel... on ne se connaît pas... le contact est "évident"... simple... je parle de ma journée et de suite j'aborde ce que je pense de "La Genèse" et là, j'entends comme une autre évidence ; pourquoi y aurait-il incompatibilité entre ce que l'on sait aujourd'hui de la création du monde et ce texte ancien ? Les mots sont simples, l'écoute attentive et respectueuse... bref, il a bien fallu écrire ce texte ancien de la Bible avec des mots, des idées et des images simples pour toucher le cœur et l'esprit des gens de l'époque. Et puis, me dit mon accompagnateur, il est moins important de savoir comment que de savoir pourquoi... c'était sa conclusion de notre premier entretien.... Ce qu'il vient de me dire, ça me plaît... je retourne au chalet et je repense à cette question qui me trotte dans la tête depuis plus de quarante ans : l'univers sert à quoi ? Admettons que Dieu ait créé tout ça parce qu'il nous aime... ça lui sert à quoi d'être gentil ?
Le soir après l'Eucharistie, l'ambiance du dîner me paraît pesante, trop silencieuse, tendue, j'ai l'impression que les retraitants "font la gueule"... comme si à un dîner de famille auquel j'arrive en retard, visiblement tout le monde vient de se disputer. Ça m'amuse plutôt, après tout, le repas est très bon, je suis fatigué de ma journée et je n'ai pas envie de parler...
Avant d'aller se coucher, le programme en trois temps de la journée du lendemain nous est proposé. Je m'endors soulagé, heureux de pouvoir oublier cette soi-disant contradiction et satisfait de cette première journée qui est passée plus que rapidement...
Mardi.
08h30, départ pour notre deuxième journée. Une heure plus tard, arrêt et exercice sur le texte de "L'Exode" 3, 1-8a. J'ai déjà lu ce texte mais là, je me concentre assis confortablement sur un rocher accueillant et lis lentement, j'essaie de m'imaginer présent au côté de Moïse... Quelque chose me chagrine dans ce texte : Dieu parle de "son peuple", le peuple hébreu esclave des Égyptiens... Je ne comprends pas bien cette restriction, le peuple de Dieu n'est-il uniquement que le peuple hébreu ? Le Seigneur n'est-il "descendu" que pour délivrer le peuple hébreu des Égyptiens ? À cette époque, il y a très vraisemblablement et malheureusement bien d'autres peuples en esclavage,... pourquoi ne sauver que le peuple hébreu ? Et là, je me rends compte que j'ai validé en moi "l'existence" de Dieu... mais Dieu "universel" qui aime tous les hommes où qu'ils soient, ...peut-être a-t-il même envoyé son fils dans d'autres régions du monde, ... il me semble que je vais trop loin dans ma réflexion,.... je continue,.... peut-être que d'autres textes écrits, qui n'ont pas survécus comme la Bible, ont relaté les actions de Dieu dans d'autres lieux ? ...
Et tout naturellement, je parle au Seigneur, je crois même que je lui parle à voix haute, sans crainte ni peur, sans être trop sûr de moi non plus ..."Sans doute as-Tu agi dans d'autres lieux, sans doute Tes actions ont-elles été transmises oralement puis par écrit, sans doute, même, ne portes-Tu pas le même nom que Dieu, Seigneur ou Yahvé..." Sans doute aussi, et j'en suis convaincu, suivant les diverses régions du monde, les différences de transcription de Tes actes, les approximations, les différences de compréhension ont-elles forgé des religions différentes.... Pourquoi si tel est le cas, ne pas admettre ces différences venues des origines et essayer de réconcilier les croyances "sœurs" ? ...
Après cette "conversation", je me sens calme, apaisé... j'ai repris la marche et me mets en condition pour l'exercice corporel du jour : Le toucher.
Je suis assis sur un rocher rugueux, trop solide, ... je sens que cette pierre dure et froide peut être dangereuse dans cette montagne... il me vient des images de chutes... des blessures, ... je me lève pour prendre contact avec les végétaux qui m'entourent, ... je caresse les branches d'un tout petit mélèze qui semble fragile, elles sont froides mais très douces, ... et je crois entendre le petit arbre me dire ; "ne me fais pas de mal, .... laisse-moi une chance de grandir...". Les feuilles du millepertuis qui est à côté sont tout aussi froides mais ne sont pas agréables au toucher, et l'arbuste semble me dire ; "laisse-moi tranquille...". Plus loin, l'écorce de l'énorme pin que j'entoure de mes bras est tiède, tourmentée, ... elle semble devoir souffrir pour que le pin puisse pousser... Et là, dans ce grand silence, faisant un câlin à cet arbre immense,... je repense à ma toute petite enfance, aux câlins que je n'ai pas eus de ma mère, à ceux que je recherchais en caressant les bras de ma maîtresse d'école..., à ceux, soixante ans après, que j'ose faire à ma mère qui est maintenant âgée... Je pense aussi aux contacts que j'aime avoir avec les vieux outils... ceux qui ont travaillé le bois... il me semble à chaque fois qu'ils me racontent comment ils ont été utilisés, comment ils ont rendu service... Mon Grand-père était charpentier, dans notre maison il passait tous les soirs, dire trois mots, boire son verre de vin et, avant de partir, il nous faisait, à mes parents et aux trois enfants que nous étions, le signe de croix sur notre front en nous disant "bénisse", .... ce sont les seuls contacts que je me souviens d'avoir eu avec mon Grand-père.... Mon père aussi me faisait ce signe,... par lui non plus je n'ai jamais eu de câlins... Ce signe, je le fais encore, quand je peux, à ma mère, à mes enfants qui me manquent beaucoup et, depuis peu à ma compagne... Je desserre cette étreinte pouvant sembler ridicule à un observateur non avisé et me remets en route pour tester le toucher de mes pieds avec le sol. Outres les réflexions logiques et banales sur les différentes configurations du terrain, je m'attarde sur ces petites zones où les pierres sont petites et sur lesquelles, malgré mes bonnes chaussures de marche, je dérape... Ces zones ne sont pas fiables, les pierres n'y sont pas liées entres elles, elles sont trop petites pour former un appui solide... Ne suis-je pas comme ces minis pierriers... Mes convictions ne sont-elles pas comme ces pierres, trop petites et surtout trop nombreuses, ...bref, suis-je solide ? Ce que j'aime, ce que je désire ne sont-ils pas trop flous, trop indécis ? ... J'ai souvent, pour ne pas dire toujours, agi par rapport à ce que pouvaient penser les autres, ...de moi, de mes actions, ...de mon comportement. En fait, ai-je été un jour moi-même et pour résumer, qui suis-je vraiment ? Tout en marchant je sens que je m'éloigne de l'exercice et que j'exagère,... en tout cas depuis ma "séparation" et ma nouvelle vie qui commence, mes choix sont beaucoup plus personnels,... sans pour cela tomber dans l'égoïsme, bref, tout va mieux...
Le dernier exercice de la journée à comme support le texte de Marc 1, 29-31. Je n'arrive pas, malgré les bonnes conditions dans lesquelles je me suis installé, à me concentrer sur le texte, ... je me sens las, j'ai ressenti trop de choses pendant cette magnifique journée... j'ai du mal à associer Dieu dans tout ce que je fais, ... je commence à l'associer dans tout ce qui a été créé...
L'entretien avec mon accompagnateur sera très fort, les échanges émouvants, ... les réflexions que j'ai eues pendant cette journée, tout ce que j'ai ressenti, tout ça me semble clair, je suis heureux, mais épuisé... la nuit arrive avec son silence.
Les jours suivants seront rythmés comme les autres, avec cette rigueur après tout très rassurante. Chaque jour deux textes de la Bible et les exercices corporels avec l’écoute, le souffle et le dernier jour le goût des fruits cueillis spirituellement.
…
Vendredi : Au dernier soir de cette retraite, je ne suis plus "le même", je n'ai plus peur de parler à Dieu, de parler de Dieu... Mon fruit préféré que j'ai cueilli durant ces jours ? J'en parlerai pendant l'Eucharistie, ... c'est celui de mardi, qui m'a fait prendre conscience de la Création par "un Dieu universel"...
Je ressens la violence de ces jours-ci... pas la brutalité, mais l'intensité des réflexions, des découvertes sur moi-même... comme me dit ma compagne, qui a cru que je ne la "voyais" plus pendant ces cinq jours : "tu n'es plus le même ", c'est vrai, et heureusement ! Je ne m'attendais pas à ce que j'ai ressenti... je crois que Dieu m'a donné rendez-vous à La Madone de Fenestre... et que nous avons parlé comme des amis, des amis qui ne s'étaient pas vus depuis longtemps ou des nouveaux amis... Il faut maintenant que je "digère" tout ce que j'ai vécu pendant cette merveilleuse retraite... sans pour autant trop "faire retomber la pression"... utiliser ce que j'ai découvert, ressenti, appris...
Extrait du bilan d’un retraitant
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